Lepaysroannais.fr : Légume lyonnais par excellence, incontournable des fêtes, le cardon se réinvente pour résister

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La famille Pestre cultive des cardons depuis 40 ans, mais la conserve est apparue il y a vingt ans, indique Vincent Pestre, ici à l’effilage.? – Photo Vicken Karkoukli.

La plus importante exploitation de cardons du Rhône est en effervescence alors que la saison s’achève. Objectif : être présent sur les tables de fête.
À l’atelier, les effileurs, pour la plupart venus de Tarare, sont au travail. Tout près, Vincent Pestre les passe à la trancheuse. Mi-octobre, l’activité bat son plein. Au total, entre 150 et 200 tonnes de cardon seront préparées cette saison.

« On fournit le cardon cultivé, effilé, prêt à cuire », explique le maître des lieux. La plus grande partie de la production sera ensuite conditionnée par la conserverie lyonnaise Malartre, mais 15 % sont destinés aux collectivités, « cantines, hôpitaux, restauration à domicile, surtout au moment de Noël ».
Et si Vaulx-en-Velin demeure la capitale historique du légume, Chevinay abrite le premier producteur rhodanien. « L’exploitation est la plus importante du Rhône, mais on est très peu nombreux en France, relativise Vincent Pestre. De toute façon, les cardons ne sont cultivés qu’en Rhône-Alpes. Un tout petit peu en Provence, mais c’est tellement confidentiel… Ici, on a une dizaine d’hectares de cardons qu’on sème au mois de mai, avec un début de paillage en septembre ou octobre, et on commence à effiler à la main début octobre. Entre les effileurs et une dizaine de saisonniers au champ, on est une grosse vingtaine à travailler pendant deux mois et demi ».

Travailler dur, pour garder à flot un légume très lyonnais mais un peu désuet.

« Le marché ne croît plus depuis deux ou trois ans, indique Vincent Pestre. Ça ne se développe plus parce que ça a vingt ans et que la nouveauté est passée. À l’époque, une partie de la consommation du frais était passée sur la conserve. Aujourd’hui, le frais tend à disparaître, et la conserve ne croît plus. Le cardon est une espèce en danger. On en produit toujours beaucoup plus qu’il y a vingt ans, mais il y a vingt ans, tout était à faire et là, tout a été fait ».

Reste que le Lyonnais est attaché à son légume emblématique. « On est sur un bassin de consommation important et riche. C’est essentiel car le cardon est travaillé à la main, donc ça coûte. Mais c’est local, ancien, bon pour la santé, festif, gastronomique… Il faut sans cesse rappeler ces fondamentaux ».
En quelques années, le marché s’est considérablement transformé et les problématiques ont évolué. « L’Espagne ne nous concurrence plus. On est sur un marché segmenté », indique Vincent Pestre. Ainsi, le consommateur local cherche un produit de qualité qu’il est prêt à payer. Reste que ce consommateur est vieillissant et que les jeunes ont du mal à s’y mettre. Aux producteurs donc de réinventer le produit (lire par ailleurs). « Aujourd’hui, il n’est pas question de croître pour croître, on est toujours des petits paysans, dans notre coin, mais on cherche toujours la croissance, car ce qui ne croît pas décline. C’est de l’économie pure », insiste le producteur. Pas question donc de laisser le marché s’effiler. « Le cardon a besoin de répondre aux attentes de la clientèle et on s’efforce de travailler dans ce sens-là. L’évolution, aujourd’hui, est plus dans la connaissance du produit et dans cette diversité d’offre ».

Vicken Karkoukli
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